dimanche 10 juin 2007

Sentence de Mort



Sentence de Mort
1968
Mario Lanfranchi
Avec : Robin Clarke, Tomas Milian, Richard Conte, Enrico Maria Salerno

 
Le dénommé Cash veut venger la mort de son frère, qui s’est fait descendre par quatre malfrats qui étaient ses complices. Jusque là, rien de bien palpitant, surtout que Cash est encore un de ces blondinets (presque) sans saveur du western italien. Mais les quatre bandits qu’il doit successivement abattre sont bien plus intéressants.

 
La bonne introduction du DVD Seven 7 précise que Sentence de Mort est un film qui n’a pas trouvé son public, produit à l’époque où la quantité de westerns tournés en Italie était à son apex. Sentence de Mort a été réalisé par Mario Lanfranchi, que rien ne prédestinait à faire du western, plutôt habitué au théâtre et à l’opéra. Ceci donne à ce western un petit coté décalé, presque intellectuel qui fait plaisir. Chaque face à face du héros avec un des meurtriers de son frère fonctionne comme une histoire à part entière, sans réel lien avec celle qui précède ou celle qui suit. Le plus marquant reste l’absence de transition entre l’épisode du prêtre et l’épisode de l’albinos : notre héros vient certes d’abattre le faux prêtre qu’il voulait tuer, mais il est néanmoins en fort fâcheuse posture, blessé à la jambe, cerné par les hommes en noir du scélérat qu’il vient d’abattre. On le retrouve à la scène suivante, dans un autre lieu, guéri, près à en découdre avec le suivant ! A part ces ellipses un peu brutales, il faut souligner l’intelligence des situations dépeintes dans Sentence de Mort. Chaque confrontation est à chaque fois plus complexe qu’il n’y paraît, assorties d’idées ingénieuses, comme ce faux puit construit en une nuit, l’idée de jouer sa vie au poker ou le fait de d’extraire une balle de son propre corps pour la réutiliser contre son adversaire. On voit d’ailleurs que certaines de ces idées sont peut-être des améliorations d’idées prises dans les films de Sergio Leone, que le réalisateur dit admirer dans les bonus : la scène initiale dans le désert est une ré exploitation de la scène du désert entre Blondin et Tuco dans Le Bon la Brute et le Truand en mettant les deux protagonistes à égalité : l’un a l’eau, mais pas d’armes, l’autre a les armes, mais pas d’eau. L’idée de jouer sa vie au poker est peut-être née de la scène où le manchot dit « Ta peau » au joueur de poker qu’il traque au début de Et pour quelques dollars de plus. Mario Lanfranchi ne se contente pas de copier, et après avoir subi d’innombrables ersatz sans couleur par des plagieurs sans odeur, il est remarquable de trouver un western spaghetti qui sait faire preuve d’innovation. Et comme un bonheur ne vient jamais seul, le défilé des personnages et des acteurs est une vraie petite réussite, mon préféré étant Richard Conte qui interprète un tueur devenu éleveur, avec gravité et émotion. Enrico Maria Salerno n’est pas mal, mais sa prestation manque un peu de la passion qui justifierait le fait qu’il aime le jeu au point de jouer sa vie. Quant à Adolfo Celi et Tomas Milian, ils interprètent deux purs salauds déments dans la bonne tradition spaghettienne, le premier en perversité contenue, le deuxième en délire malade. Et ceux qui seraient tenter de penser que Tomas Milian en fait peut-être un peu trop dans son rôle d’albinos détraqué n’auront pas vraiment saisi que la subtilité du western italien réside justement, non pas dans la demi-mesure, mais dans la démesure. Néanmoins, comme indiqué au tout début de ce papier, le héros est un blondinet à la con genre Dean Reed, Peter Lee Lawrence ou Guiliano Gemma mais en beaucoup moins bon. Dans son intro, Mario Lanfranchi insiste sur le caractère ambigu du visage de l’acteur (Robin Clarke), c’est un ange, mais un ange de mort. Il est vrai que Robin Clarke parvient à exprimer autre chose que la fadeur, mais sa prestation soufre forcément de la comparaison avec les quatre baddies précités. Sa quête de vengeance est purement mécanique, sans émotion, sans identification possible. Cela sert le caractère décalé et anti-réaliste de l’œuvre, mais un peu d’affectivité humaine n’aurait pas nuit à l’étrangeté de l’ensemble.

Der Zeven 7 DVD
Seven 7 nous a habitué à un boulot correct pour un petit prix, et il n’y a pas trop à se plaindre ici. La présentation du film est plus fouillée que sur les anciens titres, et le monologue explicatif de Mario Lanfranchi éclaire assez justement les intentions du réalisateur pour Sentence de Mort ainsi que son attachement au film. C’est tout l’intérêt du DVD, de ce genre de petits bonus et des commentaires audio de montrer que le cinéma populaire est toujours réalisé avec soin et avec ambition.Le petit bémol sur cette édition Seven 7 concerne le doublage 2006 en français des scènes coupées dans la version française de 1968. Ici Seven 7 rate son public, qui n’est pas le même que celui de TF1. L’amateur de western spaghetti sera ravi d’entendre soudain de l’italien au milieu de son film en français. En effet, figurez vous un spaghettophile averti qui tente de faire partager Sentence de mort à son entourage. Ledit entourage subit poliment le film sans rien dire, et soudain, les dialogues sont en italien ! Après avoir assuré son auditoire qu’il ne s’agit pas de son lecteur DVD qui fait des blagues, le spaghettophile averti pourra se lancer dans un passionnant exposé sur le doublage, la censure des années 60, et le charcutage des films autrefois et aujourd’hui ! Alors qu’ici, le doublage raté des scènes manquantes ne provoquera qu’un vague haussement de sourcils fatigué à vos proches et vous perdrez une occasion d’étaler votre science !
D’autre part il semblerait que les deux autres DVD sortis récemment (Texas Addios et Mannaja) aient une bande son très sourde qui nécessite de mettre le son à fond. Et puis il semblerait aussi que Mannaja n’ait que la VF, pas de piste italienne. Attention, il y a donc quelques motifs d’inquiétude pour les prochaines sorties Seven 7, un peu comme si Evidis avait vraiment tiré la qualité vers le bas !

1 commentaire:

  1. Dans les bonus, j'ai constaté que Tomas Milian n'a pas une bonne mémoire : "mon premier western était The Big Gundown", "Après j'ai tourné Run Man Run et ensuite Le Dernier Face à Face".

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